Du crédit facile à l'endettementD'une croissance illusoire à une crise bien réellePour de nombreux économistes, la crise financière que connaît l'économie mondiale depuis 2008 trouve son origine dans l'accès au crédit. Pour eux, si la croissance et le développement économique sont financés par l'épargne réellement disponible, alors, cette croissance peut être durable et soutenable. En revanche, si elle est portée par une politique monétaire laxiste, avec des taux d'intérêt faibles et une explosion du recours au crédit, que ce soit celui des Etats, des entreprises ou des particuliers, alors cette croissance finira par se renverser et inéluctablement provoquer une crise. Au début, tout se déroule bienLes investissements permis par l'endettement provoquent une hausse de la productivité, avec un effet positif sur la croissance. On voit apparaître de nouvelles technologies, de nouveaux marchés qui génèrent de la demande. Anticipant des profits futurs, les investisseurs se tournent vers ces nouveaux "Eldorado" en s'appuyant sur un crédit bon marché.Dans ces phases favorables de l'économie, le recours au crédit devient un mode de financement très prisé que les banques accompagnent en innovant, à la fois pour proposer de nouveaux produits financiers et pour accroître leur taux de marge. Des prises de décision faussées par le crédit bon marchéDe leur côté, dans l'euphorie générale, les entreprises investissent davantage, sur des projets plus risqués du fait des taux d'intérêts anormalement bas. En effet, leurs ressources financières leur coûtant moins cher, elles peuvent se montrer moins rigoureuses dans le choix de leurs projets et investir au-delà du raisonnable, dans des domaines risqués ou avec des taux prévisionnels de rentabilité plus bas, ce qu'elles n'auraient pas fait si les taux d'intérêts auxquels elles se financent avaient été plus élevés. Leur prise de décision est donc faussée par le crédit bon marché. Les banques, quant à elles, se sont lancées dans des opérations à plus haut risque et ont prêté à des investisseurs de moins en moins solvables.C'est ce que décrivait Henri Lepage dans son livre "Demain le libéralisme" (Le Livre de poche, 1980). L'excès de crédit crée une illusion de "croissance". "L'inflation de crédit crée dans le système monétaire une série de perturbations qui faussent les mécanismes de coordination du système des prix relatifs, et font que celui-ci transmet dans tout l'édifice industriel une série d'informations tronquées qui servent alors de base de décision erronée aux entrepreneurs dans leurs choix d'investissement et leurs stratégies de production." Plus dure sera la chuteQuand la politique monétaire évolue, notamment pour juguler tout risque d'inflation, alors les taux d'intérêt augmentent. Les emprunteurs, qu'ils soient ménages, entreprises ou Etats, qui se sont trop endettés, en particulier avec des intérêts à taux variables, voient leur échéance de remboursement augmenter sensiblement et sombrent dans le surendettement. L'engrenage de la crise est alors enclenché.Le paradoxe de l'endettementC'est donc l'argent facile des périodes "fastes" qui est à l'origine de l'endettement et qui prépare les crises. Ce paradoxe est explicité dans un rapport du CAE (Conseil d'analyse économique / Arthus et alii, 2008)."Les crises de surendettement se préparent dans les bonnes conjonctures, c'est-à-dire lorsque tout va bien et que les agents économiques profitent de la croissance et des taux d'intérêt bas pour emprunter parfois au-delà du raisonnable." En voulant à tout prix réduire les impôts, plus vite que la baisse des dépenses des Etats, la droite libérale a créé une croissance illusoire, financée par l'endettement. Ce que les plus riches, quant à eux, ont économisé en impôts, ils ont pu le prêter aux Etats obligés de s'endetter et ont gagné une deuxième fois en percevant les intérêts. Je vous laisse deviner qui paiera l'addition si le cours de l'histoire n'est pas changé. Pierre Tourev, 23/09/2011
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